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Montréal

Montréal - Porte d'En-Bas (XIIIe siècle)
Montréal - Porte d'En-Bas (XIIIe siècle)

Montréal : village médiéval de la vallée du Serein

Facilement accessible par la route d'Avallon à Montbard, Montréal domine un beau panorama et recèle de précieux témoignages architecturaux civils, militaires et religieux de l'époque médiévale. Comme Vézelay, qui comptait plusieurs milliers d'habitants au XIIe siècle, Montréal était à cette époque une petite ville, siège d'une seigneurie laïque fort importante dans la région. Le bourg n'a cessé de perdre du lustre depuis la fin du Moyen Âge, de sorte qu'il ne s'agit plus aujourd'hui que d'un village de moins de 200 habitants. Qu'importe ! Un détour par Montréal s'impose. Il permet de se plonger dans l'ambiance où, sur les foires locales, se côtoyaient tailleurs de pierres, changeurs, marchands, fantassins, chevaliers nobles, ducs et chanoines.

Montréal - Maison médiévale (XIIIe siècle)
Montréal - Maison médiévale (XIIIe siècle)

Le nom latin du village fut d'abord Mons Regalis, qui a évolué vers sa forme actuelle : Montréal. Il s'agissait sans doute d'un site d'oppidum à l'époque celtique, réutilisé et probablement déjà fortifié durant le haut Moyen Âge, mais de ce temps-là, rien n'a survécu. La fortune du site a été assurée par l'action d'une lignée de sires, les Anséric, dès le XIe siècle. Peu après l'an mil, en effet, le comte de Nevers Landry (v. 970-1028) tente de s'emparer de la forteresse, défendue avec efficacité par le seigneur du lieu.

Montréal - Echauguette
Montréal - Echauguette

Puis Anséric Ier (v. 1040-1083) fonde un prieuré-hôpital, Saint-Bernard, sur la route d'Avallon. Anséric II (v.1119-1174) participe à la deuxième croisade aux côtés du roi Louis VII (1146-1149) et fonde la collégiale que l'on peut encore admirer. Celle-ci est achevée sous Anséric III (1135-1191), qui fait lui-même partie des chevaliers partis en Terre-Sainte lors de la troisième croisade avec Philippe-Auguste (1189). D'ailleurs, c'est sous les murs de Saint-Jean d'Acre qu'il perd la vie. On lui doit la construction de la chapelle du prieuré-hôpital Saint-Bernard de Mont-Joux (v. 1170), à proximité. Deux travées sont couvertes de voûtes d'ogives datant de cette époque. Anséric IV (v. 1175-1216) fonde quant à lui le prieuré grandmontain de Sauvigny-le-Bois (Saint-Jean-des-Bonshommes) vers 1210. On doit à Anséric V la fondation du prieuré de Vausse, sur la commune de Châtel-Gérard. Anséric VI avait bien commencé en accordant aux habitants une charte d'affranchissement (1228), mais son comportement de seigneur pillard provoque les foudres du roi Louis IX, qui ordonne au duc de Bourgogne de le déposséder. Anséric VI est enfermé dans le château de Châtel-Gérard et est inhumé au prieuré de Vausse, où l'on peut encore voir sa pierre tombale toute simple.

Montréal - Collégiale Notre-Dame : le portail (XIIe siècle)
Montréal - Collégiale Notre-Dame : le portail (XIIe siècle)
Montréal - Collégiale Notre-Dame (XIIe siècle) : ébrasement du portail
Montréal - Collégiale Notre-Dame (XIIe siècle) : ébrasement du portail

Montréal est intégré au domaine ducal en 1292. Désormais, ce n'est plus une seigneurie. La guerre de Cent Ans apporte ensuite son lot de violences sur fond d'épidémies de peste, même si la ville, tout comme Avallon et Montbard, résiste victorieusement aux assauts de la soldatesque de l'anglais Richard Knolles en 1358. Le village se dépeuple. Le temps de l'essor économique et de la puissance politique de Montréal est terminé.

Montréal - Maison médiévale (XIVe siècle)
Montréal - Maison médiévale (XIVe siècle)

De ce passé prestigieux, que reste-t-il ? Le château qui dominait la ville depuis l'esplanade a disparu et les trois enceintes ont été démantelée à partir du XVIe siècle. Mais des vestiges de remparts sont encore debout : la "Porte d'En-Bas" qui défendait la ville basse, puis la "Porte du Milieu", par laquelle on entrait dans la ville haute et qui conserve son bastion ainsi que son échauguette, enfin la "Porte du Haut", qui donnait accès au château et à l'église, sur l'esplanade. De belles maisons des XIVe-XVIe siècles sont conservées en élévation dans le village. Et surtout, la magnifique collégiale romane de transition, toute de blancheur et de lumière, domine encore au sommet de la colline.

L'ancienne collégiale Notre-Dame (XIIe siècle)

Montréal - Collégiale Notre-Dame (XIIe siècle) : vue sur le choeur depuis la nef
Montréal - Collégiale Notre-Dame (XIIe siècle) : vue sur le choeur depuis la nef

L'édifice a été particulièrement apprécié de l'architecte Eugène Viollet-le-Duc (1814-1879), qui l'a restauré. C'est, il est vrai, un témoin remarquable de cette architecture de transition entre le roman, dont la collégiale garde l'équilibre général, le profil des piles, les bandeaux décoratifs et les voûtes d'arêtes des collatéraux, et le gothique, puisque l'ogive est intégrée dans le transept et dans un choeur à fond plat peut-être inspiré des édifices cisterciens. Commencée par Anséric II dans les années 1150 ou 1160, elle n'est achevée qu'une trentaine d'années plus tard, mais enfin, elle montre une belle unité architecturale. Elle est un exemple somptueux du premier gothique en Bourgogne, lui-même inscrit dans le prolongement d'une tradition régionale romane pleinement épanouie et qu'il ne renie pas.

Montréal - Collégiale Notre-Dame (XIIe siècle) : marque lapidaire
Montréal - Collégiale Notre-Dame (XIIe siècle) : marque lapidaire

On y entre par un portail déjà remarquable à lui-seul, avec ses arcs polylobés que l'on croirait inspirés de l'Espagne mozarabe, les colonnettes et les chapiteaux des ébrasements ainsi que les rangées verticales de fleurs qui occupent l'espace entre les colonnettes. Une rosace, parmi les plus anciennes de France, surmonte ce portail, comme on en trouve une autre aussi dans le choeur, au-dessus des baies. Une fois entré, il faut lever la tête pour admirer ce qui est également l'une des plus belles tribunes du XIIe siècle, montée sur des consoles. La sculpture des chapiteaux est certes plutôt sobre, mais elle étonne par la variété d'un décor végétal prédominant. Il s'agit notamment de chapiteaux à feuilles lisses et à crochets. La collégiale n'est devenue église paroissiale qu'à la fin du Moyen Âge. Auparavant, il existait une église paroissiale dans le bas de la ville.

Montréal - Collégiale Notre-Dame : rosace (fin du XIIe siècle)
Montréal - Collégiale Notre-Dame : rosace (fin du XIIe siècle)

Le mobilier est également digne du plus haut intérêt. Dans le collatéral nord de la nef ont été entreposés des sarcophages médiévaux dont il est bien difficile de préciser la date. L'un d'eux porte des gravures représentant des outils d'artisans. Le lutrin et la chaire du prêcheur sont des XVe-XVIe siècles. Un calvaire du XIVe siècle fait partie des richesses de la collégiale. Surtout, les 26 stalles sculptées vers 1522-1530 par les frères Rigolley de Nuits-sur-Armançon valent à elles-seules une visite, tant les personnages paraissent réalistes, parfois jusqu'à la truculence. Bien sûr, voici la Vierge rencontrant sa cousine Élisabeth ou des religieux lisant la Bible, mais aussi tel masque inspiré par l'imaginaire le plus débridé ainsi que deux buveurs joyeusement attablés à la taverne et en pleine conversation. Un monde d'une étonnante vivacité attend le visiteur dans un espace agréablement baigné de lumière blanche.

Montréal - Collégiale Notre-Dame : pierre tombale (Moyen-Âge)
Montréal - Collégiale Notre-Dame : pierre tombale (Moyen-Âge)
Montréal - Collégiale Notre-Dame (XIIe siècle) : pierre tombale
Montréal - Collégiale Notre-Dame (XIIe siècle) : pierre tombale
Montréal - Collégiale Notre-Dame (XIIe siècle) - Stalles : les lecteurs (v. 1522-1530)
Montréal - Collégiale Notre-Dame (XIIe siècle) - Stalles : les lecteurs (v. 1522-1530)

Ressources en ligne

-Site de la commune.