Vermenton conserve deux monuments majeurs de la période médiévale en Bourgogne : l'église Notre-Dame (romane et gothique) et l'abbaye cistercienne de Reigny, sur le territoire de la commune, mais isolée du bourg à quelques kilomètres plus au sud.
Église paroissiale Notre-Dame (XIIe-XIVe siècle)
Les parties les plus anciennes de l'édifice remontent aux années 1150-1160. L'époque romane a laissé sa marque au niveau du portail ouest et d'un très beau clocher (v. 1170) qu'il convient de comparer avec la tour Saint-Jean de l'abbaye Saint-Germain d'Auxerre, le clocher de Saint-Eusèbe à Auxerre toujours et avec le clocher de l'église toute proche de Prégilbert.
Hélas, le portail est mutilé : le tympan central, qui représentait le Christ en gloire entouré du Tétramorphe, a été martelé à la Révolution, comme le trumeau, où figurait Jean-Baptiste, un personnage aussi connu sous le nom de Précurseur dans la tradition chrétienne. Aux ébrasements du portail, les statues-colonnes sont à rapprocher du travail des sculpteurs des portails de la cathédrale de Chartres. Elles sont toutefois fort abîmées, mais on reconnaît quand même la Vierge à l'Enfant. Les voussures sont ornées d'anges, des Vieillards de l'Apocalypse et d'un calendrier. Le clocher est remarquable, avec son dernier étage octogonal flanqué de lanternons et agrémenté de gracieuses colonnettes.
La construction s'est prolongée par les travées de la nef vers 1170. Apparaissent ici des exemples précoces de l'ogive. Vermenton est en effet un témoin de ce que l'on appelle le premier gothique (ici, vers 1150-1180), comme le chevet et la salle capitulaire de Vézelay. Au XIIe siècle, les collatéraux et le transept ont été édifiés. Les constructeurs terminèrent par le choeur à chevet plat au XIVe siècle.
On sait en outre qu'il y avait une petite communauté juive à Vermenton. On a gardé la trace d'un Jacob de Vermenton (XIVe siècle) dont le fils, Juda, copie des manuscrits pour la communauté de Troyes.
Bibliographie
-Robert Branner, Burgundian Gothic Architecture, Londres, 1985 (2e édition), p. 191-192. Les datations de R. Branner sont à corriger au moyen des observations recueillies par Arnaud Timbert (voir infra).
-Christian Sapin (dir.), Bourgogne romane, Dijon, 2006.
-Arnaud Timbert, Vanessa Hontcharenko, « L’église Notre-Dame de Vermenton : les campagnes du XIIe siècle » dans L’architecture gothique à Auxerre et dans sa région (XIIe - XIXe siècles). Naissance, transformations et pérennité, Actes de journée d’études, 17 mai 2008, Abbaye Saint-Germain d’Auxerre, Bulletin de la Société des fouilles archéologiques et des monuments historiques de l’Yonne, no 26-27 (2009-2010), p. 21-32.
-Chantal Arnaud, Les églises de l'ancien diocèse d'Auxerre du milieu du XIe au début du XIIIe siècle. Étude historique et monumentale, Auxerre, 2009.
L'abbaye Notre-Dame de Reigny
L'histoire de l'abbaye ne commence pas sur ce site. En 1104, deux ermites, Girard et Guérin, s'installe d'abord près de Joux-la-Ville sur une terre que leur ont donnés les seigneurs Anséric de Montréal et Guy de Noyers, au lieu-dit Fontemoy. Les donations se multiplient, tout comme les moines, qui finissent par rejoindre l'ordre des cisterciens en 1128. En effet, Bernard de Clairvaux avait envoyé Étienne de Toucy aux frères. Ces derniers l'avaient pris pour abbé et c'est Étienne qui les conduisit dans le giron des cisterciens, un ordre encore assez récent à l'époque (fondé en 1098 par Robert de Molesme). Mais cette première implantation s'est révélée trop exiguë. C'est pourquoi les moines sont venus s'installer sur le territoire de Vermenton en 1134.
S'il est bien regrettable que l'essentiel des bâtiments médiévaux de cette grande abbaye aient disparu, y compris l'église abbatiale, il reste quand même le remarquable réfectoire des moines (fin XIIIe-XIVe siècle), immense nef à deux vaisseaux qui a conservé sa chaire du lecteur et sa charpente du XIVe siècle et dont c'est l'un des trois exemples en France pour cette période. La salle et le dortoir des moines sont également conservés et se visitent. Il semble que les stalles visibles dans l'église de Sainte-Pallaye tout proche proviennent de l'ancienne abbatiale. Le cartulaire de l'abbaye de Reigny, réalisé vers 1400, est conservé dans un manuscrit de la Bibliothèque nationale de France (sous la cote lat. 17725). C'est l'une des sources documentaires qui permettent aux historiens d'écrire l'histoire religieuse et économique médiévale de l'ordre cistercien en Bourgogne. Il contient environ cinquante chartes datées de 1147 à 1405. Il a été étudié par Marlène Hélias-Baron. L'abbaye est un bien privé, mais les visites s'organisent selon les modalités précisées sur le site de l'Abbaye de Reigny.
Bibliographie
-Abbé Marcel Terre, L'abbaye de Reigny, Semur-en-Auxois, 1954.
-À propos du cartulaire de Reigny, voir l'article de Marlène Hélias-Baron dans le Bulletin du Centre d'études médiévales d'Auxerre, en ligne sur le site.