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Châteauneuf

Châteauneuf - église Saint-Pierre-et-Saint-Paul (XIIe siècle) et château du Banchet (XIVe-XIXe siècle)
Châteauneuf - église Saint-Pierre-et-Saint-Paul (XIIe siècle) et château du Banchet (XIVe-XIXe siècle)

Église Saint-Pierre-et-Saint-Paul (XIIe siècle)

Châteauneuf fut tenu dès la fin du Xe siècle par la puissante famille des Le Blanc, qui y firent édifier un château, détruit au XVe siècle par les Armagnacs, et dont l'église actuelle s'inscrivait à l'intérieur du périmètre fortifié. À partir de 1239, Châteauneuf fut une châtellenie royale dépendant du tout nouveau bailliage de Mâcon, l'ancien comté ayant été acheté cette année-là par le roi Louis IX. L'église elle-même était rattachée à l'évêché de Mâcon et à l'archiprêtré de Beaujeu. Elle est établi sur un éperon qui domine et défend la vallée du Sornin.

Cette église a fait l'objet d'une restauration assez drastique par les soins de l'architecte Eugène-Louis Millet (1819-1879), élève d'Eugène Viollet-le-Duc, entre 1849 et 1866 ; il n'en reste pas moins qu'elle est un témoin remarquablement homogène de l'architecture romane de la seconde moitié du XIIe siècle en Brionnais, même si, en raison de l'influence clunisienne qui s'y est exercée, ses caractéristiques l'éloignent souvent de la grammaire architecturale la plus répandue dans cette région.

châteauneuf - Eglise Saint-Pierre-et-Saint-Paul (XIIe siècle)
châteauneuf - Eglise Saint-Pierre-et-Saint-Paul (XIIe siècle)

On peut soutenir la comparaison entre l'architecture de ce monument et celle de l'église de Semur-en-Brionnais, à peu près contemporaine, dans la mesure où bien des éléments inspirés de l'abbatiale Cluny III les caractérisent l'une et l'autre. Elle est dotée d'une nef à trois vaisseaux de trois travées chacun, tous voûtés d'un berceau brisé à lunettes. L'étagement y est à deux niveaux. Au-dessus des grandes arcades en berceau brisé et à double rouleau, des baies éclairent l'espace de la nef, dont la verticalité est accentuée par la hauteur sous voûte (12 mètres). Elles sont encadrées par des arcatures reposant sur les chapiteaux sculptés qui coiffent des colonnettes. L'étagement est souligné par un bandeau décoré de perles, tout comme à la grande baie du mur ouest (revers de façade). Cette nef, bâtie un peu avant la moitié du XIIe siècle, communique avec le chevet par un transept à peine saillant dont la croisée est surmontée par une coupole-lanterne sur trompes que l'on retrouve presque à l'identique à Semur-en-Brionnais. Les croisillons sont voûtés en berceaux également. La travée de choeur débouche sur une abside semi-circulaire flanquée de deux absidioles et dont le parement est agrémenté d'arcatures portées par des pilastres au décor sculpté très chargé et coiffés de chapiteaux sculptés. L'abside, par ailleurs dotée de trois baies, conserve une piscine liturgique romane. Le clocher, restauré, ne manque pas d'intérêt ni de beauté. Il comporte deux étages ouverts de baies, simples et surmontées d'un gable au premier étage et en forme de baies géminées reposant sur des colonnettes à chapiteaux sculptés au deuxième étage. Le tout est surmonté par un toit pyramidal ouvert de lucarnes, comme à Saint-Maurice-lès-Châteauneuf, situé à proximité. Les modillons de l'abside, à l'extérieur, sont ornés de têtes plus ou moins monstrueuses. Le chevet est un peu plus récent que la nef et fut sans doute construit durant le troisième tiers du XIIe siècle. C'est donc l'une des constructions romanes du Brionnais les plus tardives.

Du point de vue de la sculpture, il reste hélas peu de chapiteaux romans dans la nef, car ils ont été refaits lors de la campagne de restauration de 1463, date gravée sur le premier pilier à droite, dans la nef. Le sol fut alors relevé, les bases des colonnes et de nombreux chapiteaux furent refaits. À l'extérieur, le portail ouest comporte un tympan nu dont le linteau est porté par des chapiteaux sculptés. Mais c'est le portail sud qui est le plus intéressant. S'il a perdu son tympan, il conserve en tout cas un linteau qui doit être une oeuvre de remploi attribuable à la fin du XIe siècle. On y voit les douze apôtres debout sous de petites arcades. C'est une oeuvre influencée par la sculpture de Charlieu. Les chapiteaux, à gauche et à droite, représentent des ecclésiastiques ou des moines. Anelise Nicolier résume les analyses d'Edson Armi, Matthias Hamann et Neil Stratford au sujet de ce programme sculpté : le portail ouest et le portail sud sont à mettre en lien avec les chapiteaux de Vauban, Saint-Laurent-en-Brionnais et Vareilles), ceux de l'abside, de la croisée s'inscrivent dans la filiation de Charlieu.

Bibliographie

-Matthias Hamann, Die burgundische Prioratskirche von Anzy-le-Duc und die romanische Plastik im Brionnais, Würzburg, 2000.

-Guide des trente églises et chapelles romanes du Brionnais, par le Centre d'étude des patrimoines culturels du Charolais-Brionnais.

-Anelise Nicolier, La construction d'un paysage monumental religieux en Brionnais à l'époque romane, Thèse (2015), Tome III, vol. 1, Corpus : Châteauneuf : p. 330-356 : p. 333-355.