Saulieu dans l'histoire
Sidoloco, nom latin de Saulieu, est sans doute une création (ex nihilo ?) associée à la mise en place de la "voie de l'Océan" de Chalon à Sens par Autun et Auxerre, dite également "voie d'Agrippa", au tournant de l'ère chrétienne, selon Pierre Nouvel dont il faut lire l'article en ligne (2012) à propos de cet itinéraire. L'histoire de Saulieu durant le haut Moyen Âge est surtout connue à travers celle de la christianisation locale. Un vicomte de Saulieu, du XIe au XIIIe siècle, apparaît comme vassal de l'évêque d'Autun. Il a fallu fortifier la ville, saccagée par les Grandes compagnies en 1359. L'évêque d'Autun en fait reconstruire les murailles au début du XVe siècle. L'histoire ancienne et médiévale de la cité peut être appréciée en visitant le très intéressant petit musée François Pompon installé dans une demeure du XVIIe siècle (ancien presbytère), à gauche de l'entrée principale de la basilique.
La basilique (ancienne collégiale) Saint-Andoche (XIIe siècle)
Le nom d'Andoche est associé à ceux de Thyrse et Bénigne dans le cycle hagiographique qui raconte de façon légendaire la christianisation de la région au IIe siècle. C'est surtout à partir du VIe siècle que ces récits sont composés. À travers ces derniers, les Églises cherchent souvent à prouver leur origine antique et respectable en la rattachant à un martyr. La quête des reliques s'ensuit et contribue au développement des établissements religieux. Il est possible en tout cas qu'il y ait eu une première basilique dès le VIe siècle à Saulieu. Le sarcophage antique en marbre (IIIe siècle ?) aujourd'hui déposé sous l'autel et orné de sculptures en méplat réalisées sans doute à l'époque mérovingienne (VIe ou VIIe siècle) offre peut-être, en effet, une attestation d'un culte local fort ancien.
Cette basilique devient une collégiale à partir du moment où un collège de chanoines remplace les moines dans les années 1130. Il n'est pas sûr pour autant qu'il faille descendre aussi bas cette date pour fixer le début de la construction de l'édifice actuel, censé avoir été consacré le 21 décembre 1119 par le pape Calixe II, de passage à Saulieu. Du reste, comme le note Christian Sapin dans une notice sur la basilique de Saulieu, le terme "consécration" ne figure pas dans le texte relatif à cet événement. D'ailleurs, il faut rappeler que même dans le cas d'une consécration, par exemple celle de Cluny III en 1095 par le pape Urbain II, l'acte liturgique ne signifie pas que le bâtiment soit terminé, bien loin de là, souvent ! Pour continuer avec cet exemple, le chevet de Cluny III n'est pas terminé avant la fin des années 1110. Qu'en est-il donc de la collégiale Saint-Andoche ? D'après les critères architecturaux et la sculpture, il s'agit d'un édifice du second quart du XIIe siècle, en un temps de pleine maîtrise des techniques du bâti et de la sculpture de l'époque romane.
Architecture
L'église a perdu son chevet roman, détruit en 1359, puis reconstruit en style gothique, de nouveau détruit en 1704 et encore reconstruit. Ce chevet roman comportait apparemment un transept, ce qui n'est plus le cas de l'église actuelle. C'est donc sur la nef (la façade a été en partie reconstruite au XIXe siècle) qu'il faut se concentrer pour recueillir les témoignages de l'époque romane proprement dite. L'influence de Cluny à travers le modèle qu'a pu offrir la cathédrale Saint-Lazare d'Autun y est manifeste : élévation à trois étages (grandes arcades, triforium aveugle et fenêtres hautes) et voûtes en berceau brisé, mais pas de pilastres cannelés, en revanche.
Sculpture
Les chapiteaux de la nef, pour la plupart remarquables, sont l'oeuvre d'un atelier spécifique dont on peut éventuellement trouver la trace également à Laizy, près d'Autun. Certains spécialistes ont aussi établi un parallèle entre ces chapiteaux et ceux de Bussy-le-Grand, de manière moins évidente, toutefois. La mise en oeuvre montre une très grande liberté d'interprétation : c'est la caractéristique majeure de cette sculpture. L'artiste ou les artistes ont su rendre très expressifs les regards et traiter de manière personnelle le rapport entre les personnages et le cadre végétal dans lequel ils sont parfois placés. On notera donc principalement cette "liberté plastique" (Christian Sapin) pour ces oeuvres, parmi lesquelles il faut citer les chapiteaux suivants :
-L'épisode de l'Ânesse de Balaam (2e travée nord)
-L'Apparition du Christ à Marie-Madeleine ou Noli me tangere (2e travée sud)
-La Pendaison de Judas (3e travée sud)
-La Première tentation du Christ (3e travée nord)
-La Fuite en Égypte (4e travée sud)
Francis Salet notait de son côté la nécessité de différencier l'expérience d'un Gislebertus d'Autun ou encore celle du Maître du grand tympan de Vézelay de celle, bien moindre, du maître-sculpteur de Saulieu. Il faut enfin noter que le portail ouest de l'ancienne collégiale a fait l'objet d'une restauration drastique en 1869. Sont d'origine principalement les colonnes des ébrasements.
Les stalles
Il convient de signaler aussi les stalles du choeur, achevées en 1388. Elles comptent trente-deux stalles hautes et vingt-quatre stalles basses. Elles sont parmi les plus anciennes de Bourgogne, à côté de celles de Bard-le-Régulier (v. 1350) et de l'église Saint-Marcel de Cluny (fin du XVe siècle).
Bibliographie et ressources en ligne
-Jean Dupont, La basilique romane de Saint-Andoche à Saulieu, Saulieu, 1984.
-Francis Salet, "La basilique Saint-Andoche de Saulieu", Société française d'archéologie, Congrès archéologique de France, 144e session (1986) : Auxois - Châtillonnais, Paris, 1989, p. 235-243.
-Christian Sapin, Bourgogne romane, Dijon, 2006.
-Sur les stalles, lire : Monique Richard-Rivoire, « Stalles du Moyen Âge et du XVIe siècle en Bourgogne », dans Actes du 109e congrès des Sociétés savantes, Dijon, 1984, p. 197-216.
-Ead., "Les stalles en Bourgogne et en Suisse occidentale à l'époque gothique. Éléments de comparaison", dans Publications du Centre européen d'études bourguignonnes (XIVe-XVIe siècles), 25 (1985), p. 15-32.
-Visiter aussi la page consacrée à Saint-Andoche de Saulieu sur le site bourgogneromane.com.