Collégiale Saint-Martin (v. 1170-v. 1212)
Le patronage de l'église fait référence à une histoire monastique fort ancienne à Chablis. Avant le IXe siècle, il y aurait eu un monastère Saint-Loup, dans lequel des moines de Tours auraient trouvé refuge avec les reliques de saint Martin sous Charles le Chauve (840-877). Au XIIe siècle, les moines avaient déjà été remplacés par des chanoines. Ils firent reconstruire leur église dans le style nouveau qui commençait à se diffuser : le gothique, mais un premier gothique dans lequel la voûte sexpartite (à six ogives), l'alternance des piles fortes et des piles faibles ainsi que la conception du triforium, dans le choeur, empruntent beaucoup à la cathédrale de Sens commencée vers 1130-1135. Il n'est pas impossible non plus que le sanctuaire de l'abbatiale de Vézelay, achevé vers 1190, ait été connu du maître d'oeuvre et que ce dernier s'en soit également inspiré. Les travaux ont en tout cas été amorcés vers 1170. Le chevet, pour l'essentiel, a dû être élevé durant la décennie 1170-1180, puis ce fut la nef, mais les travaux ne se terminèrent peut-être que vers 1212, date à laquelle on construisit des arcs-boutant pour étayer les voûtes du choeur. On peut reconnaître quelques marques lapidaires assez jolies dans l'édifice et les portes en bois du portail roman, au sud, sont très particulières : 111 fers à cheval y ont été cloutés. Des traditions rapportent que des chevaliers ont pu y déposer ces objets pour invoquer la protection de saint Martin ou que des possesseurs de chevaux venaient demander au saint la guérison de leur bête malade.
L'obédiencerie
Cette maison des XIIIe et XVe siècle, située à côté de la collégiale Saint-Martin, était celle d'un religieux chargé d'une gestion temporelle au nom du supérieur de la communauté. Il s'agit d'une demeure privée. Elle abrite notamment un superbe pressoir à levier (XVe siècle), qui compte parmi les plus anciens de Bourgogne. On peut voir d'autres spécimens de pressoirs médiévaux au Clos de Vougeot et dans la cuverie des ducs de Bourgogne, à Chenôve, près de Dijon.
L'ancienne synagogue (maison du XVIe siècle)
Sur la base de traditions locales essentiellement, cette maison du XVIe siècle, située rue des Juifs, fait l'objet d'une hypothèse de localisation de l'ancienne synagogue, qui l'aurait précédée au même endroit. Chablis comptait aux XIIe-XIIIe siècles une importante communauté juive, cette présence économique, intellectuelle et religieuse fort ancienne étant attestée dans de nombreuses villes de Bourgogne à cette époque (du moins avant l'expulsion de la communauté en 1394). Sur la présence des Juifs dans la Bourgogne médiévale, notamment dans les villes, il faut lire les développements proposés sur le site Alliance.
Voici une vidéo sur les circonstances du réaménagement en synagogue de la maison localisée rue des Juifs :
Bibliographie
Sur les reliques de saint Martin et ses pérégrinations, voir :
-Pierre Gasnault, "Le tombeau de saint Martin et les invasions normandes dans l'histoire et dans la légende", Revue d'histoire de l'Eglise de France, vol. 47 (1961), p. 51-66.
Sur la collégiale Saint-Martin, voir :
-Robert Branner, Burgundian Gothic Architecture, Londres, 1985 (2e édition), p. 123-124.
-Élise Baillieul, "Le chevet de la collégiale Saint-Martin de Chablis", dans L’architecture gothique à Auxerre et dans sa région (XIIe-XIXe siècles). Naissance, transformations et pérennité, Actes des journées d’études, 17 mai 2008, Abbaye Saint-Germain d’Auxerre, Bulletin de la Société des fouilles archéologiques et des monuments historiques de l’Yonne, 26-27, (2009-2010), p. 33-41. Ce sont les datations d'Élise Baillieul qui sont retenues dans cette notice.